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La Nouvelle Carthage, Roman, Georges Eekhoud, lpllapetitelibrairie.fr

 Résumé :

Publié en 1888, La Nouvelle Carthage est sans doute le roman le plus ambitieux et le plus emblématique de Georges Eekhoud. L’auteur y peint un vaste tableau de la société urbaine et industrielle belge de la fin du XIXe siècle, à travers une ville fictive, Clairvaux, métaphore évidente de Bruxelles. Cette ville moderne, bruyante, tentaculaire et décadente, devient le décor d’un roman social, politique et artistique, nourri de lyrisme, de révolte et de satire.

Le personnage principal, André Baudu, est un jeune écrivain d’origine modeste, épris d’idéal et d’art, mais confronté aux compromissions du monde bourgeois. Attiré par les lumières de la grande ville et ses promesses de gloire, il va peu à peu déchanter face à la médiocrité ambiante, à l’arrivisme, à la corruption politique et au règne de l’argent. Baudu incarne à la fois le poète désabusé et le témoin lucide d’un monde en perte de sens. Sa trajectoire est marquée par des amitiés déçues, des amours troublées et un engagement intellectuel qui se heurte au conformisme social.

Autour de lui gravite une galerie de personnages — industriels, politiciens véreux, artistes ratés, ouvriers exploités, prostituées et marginaux — qui illustrent la diversité, mais aussi la violence morale d’une société rongée par les inégalités et l’hypocrisie. Eekhoud y déploie un style ample, coloré, souvent lyrique, et fait preuve d’un réalisme saisissant, où la satire et la compassion se conjuguent.

Le roman est aussi un manifeste littéraire : critique du naturalisme bourgeois, Eekhoud y affirme une écriture de l’excès, de la chair, de la liberté. Il annonce les thématiques qui marqueront son œuvre : la révolte contre la norme, l’attention aux exclus, et la quête d’une vérité esthétique et humaine.

Conclusion :

La Nouvelle Carthage est une fresque sociale puissante et prophétique, dans laquelle Georges Eekhoud dénonce la déshumanisation de la ville moderne et la faillite morale de la société capitaliste. À travers le regard désenchanté d’un jeune écrivain idéaliste, il met en scène la tension entre l’art et l’arrivisme, entre l’individu et le système. Ce roman visionnaire, à la fois lyrique et critique, dresse un constat amer mais lucide sur une époque en mutation. Par son souffle, sa richesse stylistique et son engagement, La Nouvelle Carthage s’impose comme une œuvre majeure de la littérature belge et européenne de la fin du XIXe siècle, et comme un appel intemporel à la conscience et à la liberté.

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Biographie :

Georges Eekhoud naît le 27 mai 1854 à Anvers, en Belgique, dans une famille bourgeoise d’origine néerlandaise. Très tôt orphelin de père, il est élevé par un oncle militaire qui l’envoie étudier en Suisse, puis à Paris, ce qui lui donne accès à une culture européenne cosmopolite et humaniste. Il revient ensuite en Belgique, où il entame une carrière littéraire marquée par une forte indépendance d’esprit, une sensibilité sociale et une originalité stylistique notable.

Journaliste, romancier, poète et critique, Eekhoud est d’abord influencé par le naturalisme français, mais son œuvre prend rapidement une teinte personnelle, farouchement engagée, proche de l’anarchisme littéraire. Il devient l’un des représentants majeurs du réalisme flamand d’expression française, aux côtés de Camille Lemonnier, dont il est proche. Son écriture, volontiers âpre et sensorielle, s’intéresse aux marginaux, aux humbles, aux révoltés, aux figures que la société bourgeoise préfère ignorer ou mépriser.

Son roman le plus célèbre, La Nouvelle Carthage (1888), est une œuvre ambitieuse et audacieuse. Il y dépeint avec force et ironie la déchéance morale et sociale d’une grande ville industrielle fictive, inspirée par la ville de Bruxelles. L’ouvrage lui attire autant de louanges pour son souffle visionnaire que de critiques pour son audace formelle et idéologique.

Par ailleurs, Georges Eekhoud est un précurseur en matière de littérature homosexuelle : son roman Escal-Vigor (1899), mettant en scène une relation entre deux hommes, lui vaut un procès retentissant pour « outrage aux bonnes mœurs », dont il sort acquitté. Ce combat judiciaire fait de lui l’un des premiers auteurs francophones à revendiquer ouvertement une défense de l’homosexualité dans la littérature.

Jusqu’à la fin de sa vie, Eekhoud poursuit son œuvre littéraire et s’engage dans les débats sociaux de son temps, défendant les causes libertaires, antimilitaristes et sociales. Il meurt à Schaerbeek (Bruxelles) le 29 mai 1927, dans une relative marginalité, mais laisse derrière lui une œuvre forte, indépendante, et d’une profonde modernité.

Conclusion :

Georges Eekhoud est un écrivain libre, ardent et souvent en avance sur son temps, dont l’œuvre bouscule les conventions morales et littéraires de la Belgique fin-de-siècle. À travers La Nouvelle Carthage, il dresse le portrait impitoyable d’une société en pleine décomposition, miroir de la modernité industrielle et de ses illusions. Sa plume, vigoureuse, sensuelle et profondément humaine, donne voix aux exclus et aux réprouvés, et fait de lui un maître oublié de la littérature francophone engagée. Aujourd’hui redécouvert, Eekhoud mérite pleinement sa place parmi les grandes figures littéraires de la conscience sociale et de la liberté individuelle.

Serge

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