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Escal-Vigor, Roman, Georges Eekhoud, lpllapetitelibrairie.fr

 Résumé :

Publié en 1899, Escal-Vigor est sans doute le roman le plus audacieux et le plus emblématique de Georges Eekhoud, car il aborde de front un thème encore tabou à l’époque : l’homosexualité masculine, envisagée non pas comme une perversion, mais comme un amour noble et naturel. À travers une intrigue romanesque en partie tragique, Eekhoud livre un plaidoyer courageux pour la liberté des passions et l’émancipation des êtres marginaux.

Le roman met en scène Henri de Kehlmark, un jeune noble idéaliste, riche et cultivé, qui abandonne la société mondaine pour revenir s’installer dans le domaine familial d’Escal-Vigor, au cœur d’un village flamand nommé Smaragdis. Il y espère mener une vie simple, proche de la nature et des humbles, et faire régner une forme d’harmonie sociale et morale. Son amitié puis son amour pour Guidon Govaertz, un adolescent du village d’une grande pureté d’âme, suscite la jalousie, l’incompréhension et la haine de certains villageois, notamment du fanatique religieux Claudie Perdrix, et de son complice, Landrillon.

La relation entre Kehlmark et Guidon est empreinte de tendresse et de poésie, mais leur bonheur est menacé par la violence des préjugés et des passions populaires. L’histoire bascule dans le drame lorsque la rumeur, la calomnie et l’intolérance se déchaînent contre les deux jeunes hommes. Dans une atmosphère de chasse aux sorcières, la foule, manipulée par les extrémistes, devient meurtrière.

Avec une grande force d’évocation, Eekhoud oppose deux mondes : celui de la pureté et de la vérité intérieure incarné par Kehlmark et Guidon, et celui de la bassesse sociale, du conformisme moral et de la haine religieuse, représenté par les meneurs du village. Le style du roman est lyrique, parfois flamboyant, mêlant réalisme rustique et envolées symbolistes.

Conclusion :

Escal-Vigor est un roman à la fois visionnaire et profondément humain, qui fait de Georges Eekhoud un pionnier de la littérature homosexuelle francophone. En choisissant de raconter une histoire d’amour entre deux hommes dans un cadre rural et oppressif, l’auteur défie les normes de son temps et propose un message de tolérance, de justice et de beauté. Véritable cri contre l’hypocrisie sociale et religieuse, Escal-Vigor est un roman de combat autant qu’un chant d’amour, dont la modernité et la puissance restent intactes. Ce texte courageux et vibrant demeure une œuvre fondatrice pour la reconnaissance littéraire des identités minoritaires.

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Biographie :

Georges Eekhoud naît le 27 mai 1854 à Anvers, en Belgique, dans une famille bourgeoise d’origine néerlandaise. Très tôt orphelin de père, il est élevé par un oncle militaire qui l’envoie étudier en Suisse, puis à Paris, ce qui lui donne accès à une culture européenne cosmopolite et humaniste. Il revient ensuite en Belgique, où il entame une carrière littéraire marquée par une forte indépendance d’esprit, une sensibilité sociale et une originalité stylistique notable.

Journaliste, romancier, poète et critique, Eekhoud est d’abord influencé par le naturalisme français, mais son œuvre prend rapidement une teinte personnelle, farouchement engagée, proche de l’anarchisme littéraire. Il devient l’un des représentants majeurs du réalisme flamand d’expression française, aux côtés de Camille Lemonnier, dont il est proche. Son écriture, volontiers âpre et sensorielle, s’intéresse aux marginaux, aux humbles, aux révoltés, aux figures que la société bourgeoise préfère ignorer ou mépriser.

Son roman le plus célèbre, La Nouvelle Carthage (1888), est une œuvre ambitieuse et audacieuse. Il y dépeint avec force et ironie la déchéance morale et sociale d’une grande ville industrielle fictive, inspirée par la ville de Bruxelles. L’ouvrage lui attire autant de louanges pour son souffle visionnaire que de critiques pour son audace formelle et idéologique.

Par ailleurs, Georges Eekhoud est un précurseur en matière de littérature homosexuelle : son roman Escal-Vigor (1899), mettant en scène une relation entre deux hommes, lui vaut un procès retentissant pour « outrage aux bonnes mœurs », dont il sort acquitté. Ce combat judiciaire fait de lui l’un des premiers auteurs francophones à revendiquer ouvertement une défense de l’homosexualité dans la littérature.

Jusqu’à la fin de sa vie, Eekhoud poursuit son œuvre littéraire et s’engage dans les débats sociaux de son temps, défendant les causes libertaires, antimilitaristes et sociales. Il meurt à Schaerbeek (Bruxelles) le 29 mai 1927, dans une relative marginalité, mais laisse derrière lui une œuvre forte, indépendante, et d’une profonde modernité.

Conclusion :

Georges Eekhoud est un écrivain libre, ardent et souvent en avance sur son temps, dont l’œuvre bouscule les conventions morales et littéraires de la Belgique fin-de-siècle. À travers La Nouvelle Carthage, il dresse le portrait impitoyable d’une société en pleine décomposition, miroir de la modernité industrielle et de ses illusions. Sa plume, vigoureuse, sensuelle et profondément humaine, donne voix aux exclus et aux réprouvés, et fait de lui un maître oublié de la littérature francophone engagée. Aujourd’hui redécouvert, Eekhoud mérite pleinement sa place parmi les grandes figures littéraires de la conscience sociale et de la liberté individuelle.

Serge

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